Grèce: la légalité du référendum remise en question devant la justice
A 48 heures d’un référendum aussi crucial pour la Grèce que pour la zone euro, le Conseil d’Etat grec doit juger de la constitutionnalité du scrutin. Saisi par deux citoyens grecs estimant la question mal posée et le délai trop court, le plus haut tribunal administratif du pays doit rendre sa décision ce vendredi. Le gouvernement assure de son côté que tout sera en place dimanche. Les sondages eux, laissent prévoir un résultat très serré.
Avec notre correspondante et notre envoyée spéciale en Grèce, Charlotte Siévenart et Aabla Jounaïdi
Deux jours avant la date cruciale, une décision du Conseil d’Etat grec sur la constitutionnalité du référendum est attendue ce vendredi. La saisine est venue de deux citoyens grecs « lambda » : un avocat, ancien juge au Conseil d’Etat et que certains médias grecs qualifient de proche de la Nouvelle Démocratie, et un ingénieur.
Clarté et concision
Les deux hommes estiment que le vote de dimanche doit être annulé, car il contrevient à l’article 44 de la Constitution grecque, qui interdit les référendums sur les questions fiscales. Or, c’est sur une partie du contenu des réformes proposées par les créanciers que porte la question posée dimanche. La plainte de l’ancien juge et de l’ingénieur porte également sur la formulation, que les plaignants jugent ni « claire », ni « concise », une caractéristique requise pour un référendum par une loi de 2011. Ces critiques font écho àcelles de l’opposition, depuis une semaine.
Débat sur le coût du référendum
Autre grief avancé par les opposants à la tenue du référendum : le délai très court entre l’annonce du scrutin et sa tenue. Et tandis que des critiques se font entendre également sur le coût de l’opération pour un budget grec déjà en péril, le gouvernement promet que tout sera prêt dimanche, pour le jour du vote.
Sur le principe, organiser ce scrutin devrait être d’autant plus simple que le pays organisait il y a cinq mois à peine ses élections générales. La justice, à qui cette tâche incombe en Grèce, fait appel aux mêmes observateurs qu’en janvier. Le pays ne disposant pas de système de procuration, des efforts ont été faits pour permettre aux personnes inscrites hors de leur lieu de résidence, de voter : les péages des autoroutes seront gratuits et les trajets en avion, trains et bus disponibles à prix réduits.
Au total, l’organisation devrait coûter 20 millions d’euros, selon le gouvernement. L’opposition parle, elle, d’un coût de 100 millions d’euros, ce qui devient fort cher pour un pays privé de ressources financières. Le ministère de l’Intérieur a assuré que les bulletins de votes arriveraient dans les 19 000 bureaux de vote du pays en temps et en heure, dimanche. Les résultats pourraient être connus dans les heures qui suivront la fermeture des bureaux, à 19 h, grâce au décompte électronique.
Des sondages serrés
Dans le cas où la légalité du sondage serait reconnue, l’issue de ce dernier reste d’ores et déjà très incertaine. Si en début de semaine le « non » l’emportait dans les sondages, désormais le « oui » serait légèrement en tête, sans doute un effet de la fermeture des banques qui a bouleversé leur quotidien. Selon l’institut Alco, 44,8% des grecs sont pour le « oui » contre 43,4% pour le « non ». Dans le même temps, une large majorité veut rester dans la zone euro à 74% et 12% des grecs sont encore indécis.
La campagne se poursuit aujourd’hui avec deux grands rendez-vous dans le centre d’Athènes. Les partisans du « oui », droite conservatrice, socialistes et centre gauche seront au vieux stade olympique. Les partisans du « non » seront sur la place du gouvernement. Alexis Tsipras, le Premier ministre, qui a appelé les grecs à voter « non » dimanche, sera présent.
Avec les spéculations sur ce qui pourrait advenir en fonction de telle ou telle issue. Le Premier ministre grec refuse d’anticiper, et de son côté le président du Parlement européen, lui ne s’en prive pas et s’attend, en cas de victoire du « oui » au référendum, à la nomination d’un « gouvernement de technocrates » en Grèce. Plus menaçant le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker prévient: « Si les Grecs votent « non », la position grecque sera considérablement affaiblie. »
RFI