Guinée : L’indispensable moralisation devient une urgence absolue !
Demandez aux guinéens, ils vous le diront parfois avec des mots crus : Ils en ont assez de cette classe politique qui au lieu de leur adresser des ondes positives fait tout pour ajouter dépit, déception et désappointement à leurs problèmes déjà immenses. Des déclarations impromptues à l’emporte-pièce, sans prise de conscience réelle de leurs effets sur les guinéens, on en compte tous les jours.
Regardez ou écoutez les plateaux de radio et de télévision et vous verrez des gens, des soi-disant responsables, ministres, députés, dirigeants politiques s’échanger des invectives à tue-tête.
Les combats de coqs sont partout jusqu’à agacer au plus haut point les guinéens qui n’arrivent pas à comprendre ni pourquoi ni comment on en est arrivé là.
Dans le brouhaha on perd sa dialectique locale comme son français. La liberté d’expression est certes un acquis, peut-être le seul jusqu’ici, mais il ne faut pas aller d’un excès à un autre.
Si cela était tolérable, cela n’est plus permis des décennies après alors que les problèmes du pays ne font que s’aggraver, ce qui demande une pédagogie y compris dans le débat public.
De plus les partis politiques de la majorité comme de l’opposition ne savent pas agir à l’égard du gouvernement ajoutant de la confusion à la confusion régnante.
On n’arrive pas à distinguer qui est avec qui et réciproquement. Alors qu’en démocratie les choses sont claires, même si des nuances peuvent exister entre partisans et opposants, les choses ne le sont guère chez nous.
A cause non seulement du tourisme partisan -puisqu’il est permis de changer de parti comme on change de veste- mais aussi de la transhumance entre opposition et majorité.
Une moralisation de la vie publique est dès lors plus que nécessaire. Elle commence par une déontologie du débat public qui manque cruellement. Nous avons ouvert les vannes pour la formation des partis politiques-on en est à plus de 150 actuellement-mais nous ne nous sommes jamais préoccupés de l’éthique qui doit présider à leurs activités.
Les partis concourent à l’encadrement de leurs adhérents, mais comment le peuvent-ils quand leurs dirigeants ne maitrisent pas eux-mêmes l’art de la communication entre eux, entre eux et leurs vis-à-vis des autres formations politiques et entre eux et le public qu’il soit formé de partisans ou de gens hostiles.
Mais cette moralisation ne peut être envisagée sans que l’on ne se penche sur la relation entre les partis politiques et l’argent. Car quand bien même on enregistre avec satisfaction que des partis politiques rendent publics leurs comptes, cela ne suffit pas puisqu’il leur faut donner la preuve que les montants indiqués et ils sont parfois faramineux proviennent de sources reconnues et reconnaissables, ce qui n’est pas toujours le cas.
Le rapport des hommes politiques avec l’argent doit être également réglé. La déclaration du patrimoine avant et au terme de l’exercice d’une fonction élective ou exécutive doit être respectée scrupuleusement et des dates impératives devraient être fixées à cette fin par la loi.
De même cette exigence devrait être étendue à tous les dirigeants des partis politiques. Des mécanismes devraient aussi être prévus pour que le train de vie des hommes et femmes politiques soit au-dessus de tout soupçon.
La moralisation de la vie publique dépend également d’instruments juridiques permettant la dénonciation des abus, des malversations et de la corruption. Dans cet ordre d’idées la nécessité de hâter l’adoption d’une loi sur la dénonciation de la corruption et la protection des dénonciateurs devient une urgence.
Ce sont là quelques pistes pour que le débat public soit amélioré et que la classe politique gagne la plus belle des batailles celle de l’éthique et de la morale publique.
Cela devient, il faut en convenir, une urgence absolue.
Par Ibrahim Kalil Diallo
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