Drame des migrants: l’UE annonce ses mesures
Le sommet extraordinaire de Bruxelles est censé trouver des solutions au problème des migrants en Méditerranée. Parmi les premières annonces, celle d’une surveillance renforcée de la mer et le triplement du budget de l’UE pour l’opération Triton.
La situation des réfugiés est également délicate, elle est régie par les accords de Dublin II, critiqués par les associations de défense des droits de l’homme et par les pays qui sont en première ligne. Certaines des solutions évoquées, notamment l’accueil des migrants, semblent déjà avoir trouvé leurs limites.
Avec notre envoyé spécial à Bruxelles, Daniel Vallot
L’Union européenne a décidé jeudi de tripler le budget de son opération de surveillance et de sauvetage en mer Triton, actuellement de trois millions d’euros par mois, pour prévenir de nouveaux drames de l’immigration en Méditerranée. « Nous voulons agir vite, ce qui signifie tripler les ressources financières » de cette opération, a déclaré la chancelière allemande Angela Merkel à l’issue d’un sommet de dirigeants européens convoqué après le naufrage d’un chalutier qui a fait quelque 800 morts en Méditerranée dimanche.
A Bruxelles, les dirigeants des 28 pays membres de l’Union européenne ont examiné une série de mesures pour tenter de limiter le nombre de naufrages et de lutter contre les filières d’immigration clandestine. Pour François Hollande, le message était clair dès l’ouverture du sommet : « Une décision d’un renforcement de nos moyens doit être prise et la France y contribuera. Une deuxième décision doit porter sur la lutte contre les trafiquants. La troisième décisionest d’agir sur les causes mêmes des migrations, le sous-développement. L’Europe doit en faire aussi davantage. » Il a ajouté que « la France prendra sa part » dans l’accueil des réfugiés et qu’elle accordera l’asile pour 500 à 700 Syriens.
Pour lutter contre les trafiquants, Londres envoie le fleuron de sa marine
Et le Premier ministre de poursuivre : « Ce que je vais apporter aujourd’hui, c’est le navire amiral de notre marine, ainsi que trois hélicoptères, et deux autres navires. Bien sûr cette aide doit se faire à certaines conditions : cela signifie que les gens que nous recueillerons seront amenés dans le pays le plus proche, c’est-à-dire, sans doute l’Italie, et qu’ils ne puissent pas demander l’asile en Grande-Bretagne. Quand ces tragédies surviennent, la Grande-Bretagne répond toujours présente et il n’y aura pas d’exception aujourd’hui. »
Donald Tusk, président du Conseil européen, était sur la même ligne que la France : « Sauver les vies d’innocents, c’est bien sûr notre priorité numéro un. Mais sauver des vies, ce n’est pas seulement porter secours à des naufragés, c’est aussi lutter contre les trafiquants, et réduire les flux d’immigration clandestine. Tout d’abord, nous devons traquer les passeurs. Ensuite, nous devons augmenter les capacités de nos missions de surveillance maritime, Triton et Poséidon. Enfin, nous avons besoin d’une meilleure coopération avec les pays d’origine et de transit des migrants. Tout cela nous devons le faire, pour limiter l’immigration illégale et pour que ces gens ne mettent plus leur vie en danger. »
En résumé, la position de la plupart des pays européens était de développer davantage de moyens de surveillance sans accueillir sur leurs propres sol davantage de migrants. Et puis, quant à la proposition italienne d’agir en amont sur les filières de migration clandestine en détruisant les bateaux utilisés par les passeurs, la mise en œuvre concrète de ce projet semble pour l’heure très délicate d’un point de vue tant matériel que juridique, car il faudra sans doute, pour ce qui s’apparente à une opération de type militaire, le feu vert des Nations unies.
Les accords de Dublin dépassés
Le sommet de Bruxelles avait aussi pour objectif de remettre sur la table les accords de Dublin. Adoptés au début des années 2000, ils prévoient qu’une demande d’asile soit traitée uniquement dans le pays où le réfugié a été enregistré pour la première fois. La raison est d’empêcher ce que l’on appelle « l’asylum shopping », des demandes déposées dans plusieurs Etats membres. Trente-deux pays ont signé les accords de Dublin, les Etats faisant partie de l’Union européenne plus l’Islande, la Norvège, le Liechtenstein et la Suisse.
En présence d’un réfugié, chacun de ces Etats peut demander à un autre pays signataire de prendre en charge sa demande d’asile, par exemple s’il a eu par le passé un visa ou un permis de travail dans cet autre pays, ou bien simplement s’il a franchi les frontières de cet autre pays pour se rendre dans un autre Etat signataire des accords de Dublin. Face à l’afflux de migrants ces dernières années, les pays méditerranéens les plus exposés, l’Italie, la Grèce, Chypre, dénoncent les effets pervers de ces accords. De leur côté, les associations de défense des droits de l’homme insistent sur le fait que les accords de Dublin ne garantissent pas une protection équitable de droits des demandeurs d’asile.