Cuba et les Etats-Unis ont officiellement rouvert leurs ambassades respectives ce lundi, après 54 ans de rupture diplomatique. Le drapeau cubain a pris place sur la toute nouvelle ambassade cubaine à Washington. Conséquence d’un accord annoncé le 30 juin, les bâtiments abritant les Sections d’intérêts dans chaque capitale ont retrouvé automatiquement leur statut d’ambassade.
A Washington, c’est le ministre des Affaires étrangères cubain Bruno Rodriguez qui a présidé à la cérémonie, en présence de quelque cinq cents invités, dont la secrétaire d’Etat adjointe aux Amériques, Roberta Jacobson, et de nombreuses personnalités cubaines. Sur le perron de l’ambassade cubaine, la levée du drapeau tricolore est saluée par l’hymne national, tandis que devant le bâtiment, quelques dizaines de manifestants sont venus apporter leur soutien au régime castriste.
Bruno Rodriguez, le ministre cubain des Affaires étrangères, rend longuement hommage au peuple cubain et à l’histoire de la révolution, puis il salue un début de réconciliation : « Je me réfère à l’histoire pour affirmer qu’aujourd’hui l’opportunité s’offre à nous de travailler à établir des relations bilatérales nouvelles, différentes de tout ce que nous avons connu par le passé. Le gouvernement cubain y met son entière volonté », assure-t-il.
Le défi est immense car Cuba et les Etats-Unis n’ont jamais eu de relations normales, constate le ministre, malgré un siècle et demi de liens intenses et enrichissants. Et pour atteindre ces relations normales, il faudra aller plus loin : « Seule la levée du blocus économique, commercial et financier, qui a fait tant de mal à notre peuple, la restitution du territoire occupé de Guantanamo et le respect de la souveraineté de Cuba donneront sens à cet événement historique que nous vivons aujourd’hui », rappelle-t-il.
Les Cubains entre espoir et scepticisme
En attendant les décisions politiques, les cérémonies ne sont pas terminées. A Cuba, le drapeau américain ne sera hissé sur l’ambassade des Etats-Unis que le 14 août en présence du secrétaire d’Etat John Kerry. Mais déjà, le bâtiment a retrouvé son statut d’ambassade. Melany Gideon, la trentaine, venue de Los Angeles, arbore fièrement les formulaires d’enregistrement des Américains sur le sol cubain. L’ancien, à l’en-tête de la Section d’intérêt, et le nouveau, à l’en-tête de l’ambassade des Etats-Unis. « Je suis citoyenne américaine et si j’ai besoin d’aide, je peux officiellement m’enregistrer auprès de l’ambassade », explique-t-elle.
Les Cubains se réjouissent de ce premier pas, mais certains restent sceptiques, comme Alwin qui brandit le « V » de la victoire de la révolution. « Tout ce qu’ils ont fait, c’est changer de tactique, de politique. L’impérialisme est très arrogant, très fier, pour pardonner à Cuba. Il ne va pas pardonner à Cuba. Il n’a fait que changer de tactique avec cette politique de bon voisinage », estime-t-il.
Aldis est sortie de son cabinet de consultation pour vivre ce moment devant l’ambassade américaine. Elle veut que la hache de guerre soit définitivement enterrée. « On a souffert de nombreuses années de ce conflit, cela a généré des ruptures familiales, des chaises vides dans les maisons, rappelle-t-elle, et j’espère qu’un jour, nos points de vue se rejoindront. Et sinon, au moins qu’on se respecte. »
RFI