Présidentielle au Soudan : pourquoi Omar el-Béchir va être réélu
Présidentielle au Soudan : pourquoi Omar el-Béchir va être réélu
Les élections générales soudanaises, présidentielle et législatives, se déroulent les 13, 14 et 15 avril. Quelque 13 millions d’électeurs, pour une population estimée à près de 38 millions de personnes, sont appelés aux urnes. Au pouvoir depuis 25 ans, le chef de l’État Omar el-Béchir est assuré d’être réélu face à 15 concurrents peu connus, alors que la plupart des partis de l’opposition boycottent l’élection.
Omar el-Béchir, ses 71 ans, sa canne et son turban… Une figure célèbre qui devrait continuer de diriger le Soudan, au moins pour cinq années supplémentaires. Pour celui qui est à la tête du pays depuis 25 ans, peu importe que les élections présidentielle et législatives (qui se déroulent les 13, 14, 15 avril, et dont les résultats seront connus à la fin du mois) soient jugées inéquitables ou pas crédibles par la communauté internationale, qui ne devrait pas les valider. Ni qu’elles soient boycottées par une coalition regroupant le Front révolutionnaire du Soudan (FRS, formé des groupes insurgés des régions en guerre du Nil bleu, du Sud-Kordofan et du Darfour), l’Oumma (l’une des trois principales formations du pays), quelques petits partis d’opposition et des organisations de la société civile. Ni même que ses adversaires soient au nombre de 14 : ce sont d’illustres inconnus qui lui laissent un véritable boulevard pour sa réélection.
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Répression
« Omar el-Béchir bénéficie de l’omniprésence du Congrès national, son parti politique, de la capacité de ce dernier à mobiliser les électeurs, ainsi que d’une certaine popularité parmi une frange de la population qui craint que sa succession n’entraîne des conflits, y compris au sein du parti au pouvoir, » explique Jérôme Tubiana, chercheur spécialiste du Soudan et auteur de Chroniques du Darfour (Glénat).
Depuis le début de l’année, tout a été fait pour assurer la réélection du chef de l’État. Lui a parcouru le pays faisant campagne sur ces thèmes qu’il affectionne tant, jouant sur la fibre nationaliste, tapant sur la communauté internationale. Dans le même temps, son régime durcissait sa répression contre l’opposition officielle, la société civile et les médias. Le 6 décembre à leur retour d’Éthiopie après la signature d’un accord baptisé « l’Appel du Soudan » unifiant les rangs de l’opposition, Farouk Abou Issa et Amine Makki Madani, deux militants des droits de l’homme et opposants d’Omar el-Béchir, étaient arrêtés. Ils ont été libérés quatre jours avant le début du scrutin…
Concentration des pouvoirs
En difficulté depuis septembre 2013 et les émeutes contre la vie chère (dont la répression a fait plus de 200 morts), Omar el-Béchir n’a rien lâché, recentrant davantage le pouvoir autour de sa personne et des « faucons » des services de sécurité et de l’armée, comme Bakri Hassan Saleh, son vieux frère d’armes, devenu vice-président en décembre de la même année. « Une plus grande concentration des pouvoirs validée par des amendements constitutionnels et par un remaniement ministériel qui lui a permis d’écarter ses rivaux, notamment certains idéologues islamistes comme le vice-président Ali Osman Mohammed Taha », ajoute Jérôme Tubiana.
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Omar el-Béchir a également été renforcé par la décision de Fatou Bensouda, la procureure de la Cour pénale internationale (CPI), de suspendre fin décembre les enquêtes sur les crimes contre l’humanité qu’il est accusé d’avoir commis au Darfour. Mais une nouvelle élection le protégerait tout de même du couperet de la justice internationale pour cinq années supplémentaires.
Nouveaux alliés
El-Béchir a par ailleurs réussi à se défaire un tant soit peu de son isolement diplomatique. L’Égypte d’Abdel Fattah al-Sissi lui tourne le dos, mais le Soudan peut toujours compter sur les pétrodollars qataris, le soutien de la Chine et de la Russie, tous deux membres permanents du Conseil de sécurité de l’ONU. Béchir espère bien récolter les fruits de sa participation à la coalition menée par l’Arabie Saoudite au Yémen pour sauver le régime du président Abd-Rabbou Mansour Hadi.
Même les États-Unis ont récemment desserré leur étau en modifiant légèrement l’embargo économique pour permettre à Khartoum d’importer du matériel informatique et des logiciels. Car, si le Soudan est toujours sur la liste américaine des États terroristes, Washington sait que les connaissances des services de renseignement soudanais en la matière ne sont pas négligeables. En février, Ibrahim Ghandour, un proche conseiller d’Omar el-Béchir, était reçu par l’administration américaine. Quelques semaines plus tard, Steven Feldstein, secrétaire d’État adjoint américain du Bureau pour la démocratie, les droits de l’homme et le travail, effectuait le chemin inverse…
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