Accord sur le nucléaire iranien: les réactions, de Riyad à Washington
A peine la signature de l’accord sur le nucléaire iranien avait-elle été annoncée à Vienne en Autriche que, de Washington à Riyad, les réactions - très contrastées - ont fusé. Mais un terme revient fréquemment : « historique ».
• Etats-Unis : l’opportunité d’une « nouvelle direction »
L’accord offre l’opportunité de donner une « nouvelle direction » aux relations entre les Etats-Unis et l’Iran, a salué Barack Obama, dans un discours retransmis en direct sur les chaînes de télévision américaines et, c’est assez rare pour le noter, sur la télévision officielle iranienne.
Le président des Etats-Unis a tenu à mettre en garde le Congrès contre un éventuel vote « irresponsable ». Il a également prévenu qu’il mettrait son veto à tout texte législatif qui remettrait en cause l’application de l’accord signé à Vienne.
Le président Obama a offert aux Américains le plus important accord de paix conclu ces dernières décennies, analyse le correspondant de RFI à Washington, Jean-Louis Pourtet. Pour Barack Obama, qui accumule les succès ces dernières semaines (loi sur la santé, mariage gay confirmé par la Cour suprême, autorisation de négocier un accord de libre échange avec la zone Asie-Pacifique, Cuba), l’accord nucléaire avec l’Iran est une immense victoire diplomatique qui sera probablement, s’il devient réalité, le point d’orgue de sa présidence.
• Israël : une « erreur historique »
Le Premier ministre israélien, Benyamin Netanyahu, n’a pas attendu l’annonce formelle de la signature de l’accord pour juger que celui-ci était « une erreur historique pour le monde » dès les premières heures de la matinée, ce mardi. La classe dirigeante israélienne lui a emboîté le pas. Une « capitulation », pour certains, « la victoire des ayatollahs face à l’Occident » pour d’autres.
« Des concessions fatales ont été faites à Téhéran, a proclaméBenyamin Netanyahu. Nous n’avons pas dit que nous empêcherons la signature d’un accord. Mais nous nous sommes engagés à empêcher que l’Iran se dote de l’arme nucléaire. Une promesse qui reste toujours en vigueur. »
Tsipi Livni, l’une des responsables de l’opposition israélienne, estime que l’accord de Vienne risque de « provoquer de graves problèmes au Proche-Orient ». L’opposition israélienne de gauche estime dans l’ensemble, tout comme l’entourage du Premier ministre, qu’il s’agit d’un mauvais accord, particulièrement en ce qui concerne Israël, rapporte le correspondant de RFI à Jérusalem, Michel Paul.
Mais l’opposition attaque également Benyamin Netanyahu, le rendant en partie responsable de cet échec. Certains rappellent notamment son discours devant le Congrès américain. « Le Premier ministre a cherché la confrontation avec les Etats-Unis, et même directement avec le président Barack Obama. Et il a échoué », juge un député de gauche. Quant aux députés arabes israéliens de la Knesset, ils se félicitent de l’accord et proposent qu’il soit appliqué également en ce qui concerne le dossier nucléaire israélien.
• Arabie saoudite : la crainte de la perte d’hégémonie
Les autorités saoudiennes étaient farouchement opposées à cet accord, et c’est un coup de massue, rapporte notre correspondante à Riyad, Clarence Rodriguez.
En mars dernier, alors que les « 5+1 » étaient en pleine négociations sur le dossier nucléaire iranien, le prince saoudien Turki al-Faisal, ancien responsable des renseignements du royaume, avait mis en garde l’Occident contre un risque de course à l’armement nucléaire au Moyen-Orient. Une allusion à l’Arabie saoudite qui pourrait, elle aussi, demander le droit à mettre en œuvre un programme nucléaire. Info ? Intox ? Les autorités saoudiennes ont en tout cas déjà signé un accord de coopération nucléaire avec la Corée du Sud, la Russie, la Chine et la France, qui inclut un plan d’études concernant la faisabilité de la construction de réacteurs nucléaires dans le royaume.
L’autre conséquence, c’est qu’avec cet accord, l’Arabie saoudite risque de perdre son hégémonie dans la région. Elle verrait ainsi tous ses efforts déployés depuis le renversement du Shah en 1979 annihilés. On peut en effet craindre que cet accord ne ravive encore plus les tensions confessionnelles et politiques entre la République islamique d’Iran et l’Arabie saoudite dans une région déjà à feu et à sang.
RFI