Le chef de l’Etat guinéen continue de faire boule de neige sur le plan national et international. Ses discours ne passent plus inaperçu.
D’ailleurs la presse Africaine en fait un véritable sujet d’analyse. En marge de sa visite à Paris, le président de l’Union Africaine n’est pas allé du dos de la cuillère.
Alpha Condé précise que l’Afrique est devenue majeure. D’abord, lors de la déclaration conjointe du mardi avec son ami François Hollande, Alpha Condé a estimé que les problèmes africains devaient désormais être résolus par des Africains.
Ensuite, lors du dîner d’État organisé le soir même en son honneur, Alpha Condé est revenu sur la nécessité que l’Union africaine, ait une autonomie financière.
Il déplore que la survie de cette institution dépende encore de fonds européens. Depuis quelques mois, un projet de réforme institutionnelle de l’UA piloté par le président rwandais Paul Kagamé prévoit en effet de prélever 0,2 % des importations pour financer l’instance panafricaine ajoute-t-il.
Il a aussi dénoncé l’autorité des ONG sur le continent :
« Nous voulons qu’on nous laisse déterminer quel est le développement que nous voulons », a-t-il plaidé. Ce discours révolutionnaire a polarisé l’actualité et continu d’occuper la une des journaux et sites Africains. « Alpha Condé proclame l’indépendance de l’Afrique », titre Senenews.
Un autre site sénégalais, L’Essentiel, évoque un discours « à la Sankara », tandis que Bénin Monde Infos titre lui aussi Alpha Condé en leader révolutionnaire. Déjà en début d’avril, le site béninois réagissait déjà à l’appel d’Alpha Condé qui invitait ses paires à « couper le cordon ombilical» avec l’ancienne puissance coloniale.
Un discours qui corrobore avec celui de Sékou Touré qui dit non à la France en 1958. « Alpha Condé s’inscrit dans le même combat que son prédécesseur Sékou Touré dont il faut se rappeler la célèbre phrase : Nous préférons la liberté dans la pauvreté à la richesse dans l’esclavage », écrivait alors Christophe Sessou.
Au lendemain du séjour parisien d’Alpha Condé, le site d’info béninois ne se départit pas de cette analyse.
Autre élément qui relativise la force du discours de rupture porté par le chef de l’UA selon certains titres de la presse africaine : les liens persistants entre la France, ses lobbies financiers ou militaires, et certains dirigeants du continent.
Le titre de Ouagadougou réagit non seulement à la visite parisienne du président guinéen, mais aussi à celles, la même semaine, du Mauritanien Mohamed Ould Abdel Aziz et du Burkinabè Roch Marc Christian Kaboré.
Il évoque la « lutte contre le terrorisme » menée par Paris dans le Sahel, mais aussi « les énormes intérêts » que la France doit défendre en Afrique.
« Ce n’est pas demain la veille que le continent coupera le cordon ombilical avec la France », conclut Le Pays. Si les prises de position d’Alpha Condé ont ainsi fait l’objet de critiques et que les médias en ont pointé quelques incohérences, elles ont aussi soulevé l’inquiétude, en particulier en Guinée. De nombreux titres s’interrogent sur le sens des déclarations du chef de l’État à propos de la démocratie. « Il faut qu’on cesse de prendre l’Afrique comme un seul État, il y a beaucoup d’États avec des réalités différentes », a-t-il expliqué.
Sur RFI et dans les colonnes du quotidien Libération, le président guinéen a par ailleurs balayé la question d’un éventuel troisième mandat de la façon suivante :
« Arrêtons avec cette vision dogmatique de savoir si la bonne chose est un, deux ou trois mandats. Ça dépend de chaque pays et de la volonté de son peuple.
Nous ne voulons plus que l’Occident nous dicte ce que nous devons faire. Les pays développés, on ne leur pose pas la question ! Est-ce qu’on pose la question à Singapour par exemple, le Premier ministre est dans son troisième mandat.
Pour le moment, j’ai un programme de développement et je me bats pour l’appliquer. Ma préoccupation n’est pas le nombre de mandats a réagit Alpha Condé. La question reste préoccupante à Conakry. « Alpha Condé maintient le flou », titre ainsi Guinée 360. Il « esquive la question » selon Guineenews.
Le choix de Paris comme lieu pour exprimer ce penchant, de surcroît à moins de deux semaines du premier tour de l’élection présidentielle française, n’est pas anodin.
Non seulement il laisse croire aux Guinéens qu’il a soit l’aval de la France ou qu’il ambitionne de se défaire de la tutelle française dans sa volonté de déroger aux principes universels de la démocratie conclut le journal Burkinabè Le Pays.
N’bany Sidibé pour Journal Guinée
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