Visite de John Kerry à Sotchi: les dossiers qui fâchent et les autres
Visite de John Kerry à Sotchi: les dossiers qui fâchent et les autres
Le secrétaire d’Etat américain a été longuement reçu par le président Poutine et son homologue russe Sergueï Lavrov à Sotchi, en Russie. Quatre heures d’entretien avec Sergueï Lavrov et autant avec Vladimir Poutine. Des discussions «franches» si l’on en croit les deux partenaires, dont les relations sont très tendues depuis 18 mois en raison de la crise en Ukraine.
avec notre correspondante à Moscou,Muriel Pomponne
A ne regarder que la forme, on pourrait croire que les relations entre la Russie et les Etats-Unis sont au zénith. Echanges de cadeaux et de politesses entre John Kerry et Sergueï Lavrov, accueil tout sourire de Vladimir Poutine. Alors que les deux puissances traversent la pire crise de leurs relations diplomatiques depuis 20 ans, la première visite d’un haut responsable américain depuis le déclenchement du conflit en Ukraine, était en soi le signe d’une volonté de renouer des liens. La rencontre a eu lieu à l’initiative américaine mais a été saluée par les Russes.
Et il est vrai que cette reprise de contact, après des mois sans dialogue direct, s’est plutôt bien passée. Mais sur le fond, les points de vue n’ont pas changé. D’ailleurs les entretiens n’étaient pas encore achevés, qu’un premier communiqué de la diplomatie russe soulignait que Moscou était prêt à coopérer, mais « sans diktat ni contrainte », et que les « tentatives de pression par le biais des sanctions étaient une voie sans issue ».
Ukraine : respect des accords de Minsk
Concernant l’Ukraine, malgré les différences de point de vue, les diplomates russe et américain affirment leur volonté de résoudre pacifiquement le conflit ukrainien. Toutefois Sergueï Lavrov et John Kerry n’ont pas mis en avant les mêmes priorités.« Je réaffirme le point de vue américain : que l’accord de Minsk constitue la voie la meilleure vers la paix, a assuré le secrétaire d’Etat américain. Et cet accord doit être entièrement réalisé. Le plus tôt sera le mieux. Si et quand cet accord sera totalement appliqué, il est clair que les sanctions américaines et européennes pourront commencer à être levées. Mais j’exprime aussi ma vive préoccupation concernant la situation sur le terrain ; la poursuite des violations du cessez-le-feu, notamment à Chirokiné et à l’aéroport de Donetsk, la poursuite de l’armement, de l’entraînement des forces séparatistes. »
Le secrétaire d’Etat américain a également demandé la libération des prisonniers, en particulier celle de la pilote ukrainienne détenue à Moscou Nadia Savtchenko. Pas de réponse sur ce dernier point de Sergueï Lavrov qui a d’autres priorités. « Je suis d’accord avec John que les violations du régime de cessez le feu continuent, a répondu le chef de la diplomatie russe. Il y a aussi des violations de l’accord sur le retrait des armes lourdes des deux côtés. Aujourd’hui nous avons utilisé un critère commun, c’est le monitoring de la mission spéciale de l’OSCE, qui, en général fait son travail de façon professionnelle, bien que de temps en temps les autorités ukrainiennes les accusent publiquement d’être de parti pris. C’est une attitude qui n’est pas très appropriée ».
Le dossier syrien
John Kerry n’a pas voulu détailler sa conversation avec les autorités russes concernant la Syrie. « Nous comprenons tous les deux que la situation en Syrie a atteint un niveau, non seulement insoutenable, mais aussi dangereux pour la région, a déclaré John Kerry. Nous sommes tous les deux d’accord que la montée de l’Etat islamique menace non seulement le régime de Bachar el- Assad, mais est aussi une menace pour l’ensemble de la région. Et il est très urgent pour nous tous de trouver des partenaires qui ont la volonté de mettre en oeuvre les principes de Genève, à savoir une transition vers un gouvernement non religieux, qui maintient les institutions de l’Etat, et une transition vers la paix et la stabilité ». Sergueï Lavrov a lui préféré insister sur la division de l’opposition syrienne. « Nous avons des positions très proches avec les Etats-Unis. Nous sommes convaincus que le processus doit être mené par les Syriens eux-mêmes, et qu’il doit être représentatif. Mais compte tenu des divergences entre les groupes d’opposition, il est important que tous les acteurs extérieurs, qui ont une influence sur tel ou tel groupe, les poussent à négocier sur la base des principes de Genève de 2012 ».
S’il est un dossier international sur lequel les deux pays semblent encore marcher dans la même direction, est bien celui du nucléaire iranien. Un accord doit être trouvé d’ici le 30 juin. C’est sans doute l’une des raisons de la volonté américaine de renouer avec Moscou.
RFI