La violence et la division doivent cesser en Guinée (Par Professeur Koutoubou Moustapha SANO)

En dépit de nos appels et ceux de toutes les filles et fils dignes de notre chère patrie à la retenue et au dialogue, et malgré les conséquences néfastes de la violence et de la division sur l’économie nationale et le tissu social, force est de reconnaître que le calme et la quiétude ne sont pas encore de retour dans nos cités.
Pour preuve, il y a à peine une semaine que des familles guinéennes ont été endeuillées, dans la commune de Ratoma, par la mort cruelle de deux personnes, arrachées à notre affection à la fleur de l’âge. Les deux jeunes gens ont été lâchement tués par des ennemis de notre nation.
Au même moment, c’est une autre famille qui est éplorée par une mort barbare et atroce. Il s’agit de celle d’un jeune gendarme qui a été sauvagement tué par des criminels qui ont diablement décidé de semer la terreur et de faire régner leur loi dans la cité.

Chers compatriotes

Il est temps de mettre fin à cette situation horrible et inadmissible. Je ne le dirai jamais assez, il est temps également de nous défaire des extrémistes et autres opportunistes de tous bords pour sauvegarder l’intérêt supérieur de notre nation.
Aujourd’hui, plus qu’hier, nos pauvres familles doivent cesser de compter les victimes des violences ignobles commises par des gens sans foi ni loi, et pour des causes inavouées.
La récurrence ininterrompue de la violence dans nos cités en général et dans nos quartiers en particulier, risque de faire croire à nos générations montantes que la paix, la stabilité et la cohésion sont des exceptions ou des rêves pour notre peuple ! Quel danger pour le pays ! Et surtout quel avenir pour la nation !
Par conséquent, il ne faut ni attendre ni espérer aucun développement ou progrès social au profit de ces générations. Et pour cause, elles ont été trop longtemps privées de la quiétude, de la concorde, du travail et de la justice. Des valeurs et principes à l’épreuve desquels ces générations n’ont jamais été placées.

Chers compatriotes, l’heure est sincèrement grave et préoccupante, et chacun de nous est interpellé, plus que jamais, à contribuer à sa façon et à sa manière, à la promotion inconditionnelle de la citoyenneté et de la paix. Mais aussi, au renforcement sincère de la cohésion sociale et à la lutte sans merci et sans réserve contre la violence communautaire et la division communautariste.
À cet égard, j’ose croire que nos pouvoirs publics doivent œuvrer au renforcement de la bonne gouvernance, à l’instauration de la justice, à l’application stricte, rigoureuse et équitable de la loi. Cela en mettant un accent particulier sur la réduction voire la disparition de l’impunité sous toutes ses formes dans notre société.
Par ailleurs, nous rappellerons à satiété, l’impérieuse nécessité pour nos différentes formations politiques, de faire le choix responsable et audacieux d’extirper de leurs rangs, et cela de manière définitive, tous les extrémistes et les opportunistes qui y ont trouvé refuge. Ainsi, nos partis politiques ne doivent plus tolérer des discours incendiaires, injurieux, insolents et malveillants dont l’ignorance le dispute à l’arrivisme de ceux qui les tiennent.
Ces efforts conjugués de nos pouvoirs publics et de nos formations politiques permettront, sans doute, de cultiver la solidarité, l’entente, l’amour du prochain, la paix, l’unité et la concorde nationale.
Grâce à cet état d’esprit où la responsabilité et le sens de l’intérêt commun l’emportent sur l’affrontement et l’égoïsme, nos formations politiques pourront également faire valoir leurs revendications légales à travers des voies pacifiques et des moyens légaux. À cet effet, la méthode Ghandiste et les démarches de la plupart des démocraties contemporaines, sont des cas d’école qui méritent une attention particulière. En y faisant recours, sans désemparer, je suis convaincu que nos acteurs politiques de tous bords confondus se feront écouter et respecter, et in fine, obtenir la satisfaction de leurs revendications sans violence.

Cette lutte noble ne pourrait cependant être envisagée sans l’implication volontaire et volontariste de nos formations sociales. Je veux parler du mouvement syndical, des organisations de la société civile, des sages et des chefs religieux. Ils se devraient tous d’assurer leur rôle citoyen et digne : celui de dire la vérité, toute la vérité pouvant amener les pouvoirs publics et les formations politiques à respecter les lois de la République, à promouvoir l’unité nationale, à instaurer la justice sociale et à rejeter la violence et l’incivisme sous toutes leurs formes. Il est donc impératif que ces formations sociales observent une neutralité totale, une honnêteté exemplaire, une sincérité dévouée, un courage olympien, et une sérénité irréprochable, en vue de mériter la confiance et l’admiration de la nation. Elles devraient également éviter, à tout prix, de favoriser ou créer la confusion, la discorde et le chaos. En fait, elles sont et demeurent le dernier recours de la nation. Certes, les pouvoirs publics et les formations politiques devraient accorder tout le respect requis et toute la protection nécessaire à ces entités sociales, afin de leur permettre d’exercer leur rôle dans la dignité, et contribuer ainsi à la création d’une société paisible, prospère et solidaire.

Quant à notre quatrième pouvoir, les médias, il doit faire preuve de maturité, de professionnalisme, de responsabilité et de cohérence. Fut-il au nom de la liberté d’expression, ce pouvoir devrait s’abstenir de donner un espace libre aux extrémistes et aux opportunistes que nous ne nous lasserons jamais de dénoncer. Car, dans certains cas, cette liberté tourne, malheureusement, en un libertinage inconcevable, lorsqu’elle ne respecte plus les lois et les valeurs de la République. Elle devient également liberticide lorsqu’elle sert de tribune à des individus qui s’illustrent davantage dans les injures et la diffamation dans la cité. Ces médias doivent vigoureusement s’employer à dénoncer et démasquer tous les jours, les marchands d’illusions et autres promoteurs de la haine. La presse ne doit donc, et en aucun cas, accepter de véhiculer des messages de division et de discorde. Autrement dit, tout message qui compromettrait ou mettrait en danger l’unité nationale, la cohésion sociale et le dialogue responsable, ne devrait pas avoir de créneau dans nos médias.

Pour que le quatrième pouvoir puisse s’acquitter de son devoir sacré, il lui est impérieux de fermer ses colonnes, ses micros et ses cameras aux trouble-fêtes et autres arrivistes sans foi ni formation qui distillent à volonté des discours irresponsables. Je suis parmi ceux qui croient fermement que le journalisme est un métier noble, responsable et indispensable à la démocratie et la bonne gouvernance. Bref, à l’équilibre de toute société.
Ce métier ne doit être convoité que par des hommes responsables, bien formés, conscients et conséquents. Car, à nos yeux, le journalisme équivaut au métier d’enseignant.
Les métiers d’enseignant et de journaliste, doivent se compléter et rester au-dessus de la mêlée, afin d’encadrer et de guider le peuple en général et les générations montantes en particulier vers un avenir radieux.

Je termine cet article en m’inclinant pieusement devant les dépouilles mortelles des victimes de toutes les violences de tous les temps. Puisse Le Seigneur, Le Miséricordieux, Le Très Miséricordieux, les accueillir dans Son Paradis Éternel.

Mes condoléances émues et celles du peuple de Guinée tout entier à toutes nos familles endeuillées.

Que les victimes reposent en paix. Amen !

 

 

 

 

Professeur Koutoubou Moustapha SANO (PhD in Laws)

Ministre conseiller diplomatique du Président de la République