Les drames de la migration qui se succèdent en Méditerranée résonnent d’une manière particulière dans les rues de Dakar et de Bamako. Alors que les chefs d’Etat des 28 pays membres de l’Union européenne se réunissent ce jeudi à Bruxelles pour un sommet extraordinaire sur la crise des migrants en Méditerranée, RFI a recueilli les attentes de jeunes Maliens et Sénégalais, candidats au départ ou non.
Le Mali est l’un pays de passage pour les candidats à l’émigration clandestine vers l’Europe. Auparavant, ils passaient par le nord du Mali pour rallier l’Algérie, le Maroc, ou les enclaves espagnoles de Ceuta et Melilla. Mais cette route n’est plus prisée, à cause de la crise qui sévit dans le septentrion malien. Côté Mauritanie, les forces de sécurité sont mobilisées pour empêcher les départs, notamment à Nouadhibou, autre lieu de passage des migrants. C’est donc désormais la Libye, via le Niger, qui attire le plus de migrants. Une route libyenne qui est plus chère, et plus dangereuse. Mais quasiment tous les candidats à l’aventure qui passent ou partent du Mali n’ont tout de même qu’une idée en tête : partir, ou repartir.
A Bamako, ils sont Maliens, Nigériens ou encore Camerounais. Des candidats à l’émigration clandestine qui rongent leur frein, pour le moment, mais ne renoncent pas. « Tant qu’ils n’ont pas trouvé une solution à la base, et en même temps une solution sur la Libye, c’est clair que les jeunes vont continuer à traverser la mer. Ce sera un jeu de ping-pong », juge un Bamakois.
D’autres en appellent directement à l’Union européenne, pour améliorer sa politique de codéveloppement, ou pour faciliter les procédures de visas. « On veut demander à l’Union européenne si elle peut nous aider, pour que ces jeunes puissent faire quelque chose en Afrique », lâche un jeune homme. « Pour moi, ils devraient nous aider, nous faciliter les choses pour avoir des visas. Le problème, ce sont les visas », rétorque un autre. « Ils viennent ouvrir leurs sociétés ici, et chercher des gens qui ont des compétences pour travailler avec eux, insiste un autre. Il faut nous libérer, nous permettre d’aller travailler. Parce que nous, on ne veut que travailler. Même chez eux, là-bas, on travaille. »
« On rêve… C’est une obsession »
« On rêve… C’est une obsession », lâche un jeune homme, pour qui « les familles de ces victimes ne jouent pas franc-jeu, elles poussent parfois les jeunes à partir par tous les moyens. » Pour certains, comme cette jeune femme, il faut « se contenter de ce que l’on a ». « En tant que Sénégalaise, j’aurai préféré que les jeunes restent ici, chez eux, pour travailler. Il y a du travail, ici, au Sénégal », affirme-t-elle. « Les pays du Nord doivent aussi apporter leur contribution aux pays sous-développés, abonde un autre Dakarois. S’il y a du développement, les Africains n’auront pas à s’aventurer en Europe », plaide-t-il.
Et si les gouvernements européens sont interpellés, dans les rues de Dakar, on en appelle aussi aux responsables sénégalais : « Au niveau de l’Etat, aussi, les gens doivent faire plus d’effort pour trouver de l’emploi aux jeunes, souligne un jeune Dakarois. Développer, par exemple, l’agriculture. Parce que l’on sait que tous ces jeunes sont issus du monde rural. Et il faut essayer de fixer ces jeunes dans leur terroir par le développement de projets porteurs. »